A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V W X Y Z


Rome
Dictionnaire Biblique Westphal
Bost Calmet

1. La puissance romaine

L’histoire romaine n’est pas l’histoire d’une nation, mais celle d’une ville. Au Ve siècle avant Jésus-Christ. Rome n’était encore qu’un bourg, rattaché à la confédération des petites cités du Latium, qu’elle finit par dominer. Deux siècles plus tard elle s’était rendue maîtresse de l’Italie, soumettant successivement les Étrusques (395), les Samnites (295) et les Grecs (275). Dès lors devenue une des grandes puissances méditerranéennes, elle étendit son autorité sur toute la Méditerranée occidentale, grâce à sa victoire sur Carthage, puis sur l’Orient et la Grèce. Au début de notre ère, Rome était « maîtresse du monde ». C’est Pompée qui en 63 et 62 incorpora à l’empire la Syrie et la Palestine.

La réussite extraordinaire de la conquête romaine est due sans doute à bien des circonstances fortuites, à la situation privilégiée de Rome au centre de l’Italie (voir ce mot) et de l’Italie au centre de la Méditerranée, mais elle est due surtout, il faut le reconnaître, à l’énergie et à la ténacité du caractère romain.

2. La ville de Rome

Elle est située sur le Tibre, à une vingtaine de kilomètres de la côte, non loin du point où le fleuve quitte les montagnes pour entrer dans la plaine du Latium. La légende fait remonter sa fondation par Romulus à 753 avant Jésus-Christ. L’enceinte primitive de la cité, construite probablement vers 650, englobait « les sept collines », parmi lesquelles le Palatin, premier noyau de la ville, site de la Rotna quadrata de Romulus, où les empereurs construisirent plus tard leurs palais et leurs jardins, — le Capitale, centre religieux, où se dressaient le temple de Jupiter et la citadelle, — l’Aventin, quartier populaire qui joua un rôle important au moment des luttes entre patriciens et plébéiens. Entre le Capitole et le Palatin s’étendait le Forum, primitivement le marché, plus tard le centre politique de la ville, couvert de temples et de monuments publics. Les Romains furent de grands bâtisseurs. La ville et la campagne romaine sont encore couvertes des ruines de leurs temples, thermes, aqueducs, tombeaux et arcs de triomphe. Sous l’empire la ville ne cessa de s’agrandir et de s’embellir. Auguste couvrit de monuments la plaine du Champ-de-Mars ; à côté du Forum proprement dit s’établirent successivement les forums de César, d’Auguste, de Nerva, et surtout celui de Trajan, le plus magnifique. Vespasien bâtit le Colisée.

3. Provinces romaines

Les territoires conquis par Rome étaient organisés en provinces, qui furent d’abord gouvernées par les magistrats de Rome, consuls ou préteurs ; mais, lorsque leur nombre augmenta, on créa comme gouverneurs des magistrats spéciaux, les proconsuls ou propréteurs, choisis généralement parmi les consuls ou préteurs sortant de charge. Sous la république les proconsuls dépendaient du Sénat ; à partir d’Auguste on distingua provinces sénatoriales, sous le contrôle du Sénat, et provinces impériales, sous le contrôle de l’empereur ; les premières étaient complètement pacifiées, les secondes, récemment conquises, nécessitaient la présence d’une armée. Le proconsul ou propréteur, représentant la puissance romaine, possédait les pouvoirs les plus étendus ; il était à la fois le chef d’armée et le juge suprême. En général les provinces s’administraient elles-mêmes selon leurs coutumes, mais toujours sous la surveillance du gouverneur romain. On donnait encore aux gouverneurs romains des provinces impériales les noms de légat pour les plus importantes et, pour les autres, de procurateur ou de préfet. Sous la république les gouverneurs exercèrent souvent leur mandat d’une manière arbitraire et tyrannique. La situation des provinces s’améliora sous le régime impérial (Voir Palestine au siècle de Jésus-Christ). Rome était encore représentée par d’autres fonctionnaires, en particulier par les publicains ou péagers (voir ce mot), chargés du recouvrement de l’impôt, par les militaires, par les colons romains, par un certain nombre de financiers et d’hommes d’affaires, par des indigènes d’un rang élevé qui avaient reçu le titre de citoyens romains.

4. Rome et le christianisme

  1. L’histoire évangélique. Rome, qui n’apparaît que tardivement sur la scène du monde oriental, n’est pas mentionnée dans l’Ancien Testament, mais c’est un des principaux acteurs du drame évangélique. Elle domine le monde et en particulier ce petit monde juif où s’exerce le ministère de Jésus (voir César). Or les Juifs sont beaucoup moins sensibles aux avantages de la civilisation romaine qu’aux vexations du joug romain, au poids de ses impôts, aux profanations du temple de Jérusalem. Jésus ne prend pas position dans le conflit qui met aux prises la puissance romaine et le nationalisme juif, mais on ne comprendrait rien à la société juive de son temps ni à l’histoire évangélique, si l’on ne tenait compte de ce conflit. Finalement c’est un juge romain, Pilate (voir ce mot), qui se laisse arracher la condamnation de Jésus, les exécuteurs du supplice sont des soldats romains commandés par un centenier, et le supplice lui-même, d’origine carthaginoise, était adopté par Rome pour les criminels de basse extraction (voir Croix, Crucifiement).
  2. L’Église primitive. Le monde romain est le milieu dans lequel se développe le christianisme naissant ; mais il ne sert pas seulement de cadre à ce développement : à un certain moment, fatalement, il va s’y opposer, et Rome persécutera l’Église (voir Néron). Le conflit ne se révèle pas encore dans le livre des Actes ou les épîtres, où les fonctionnaires romains paraissent généralement indulgents pour les missionnaires chrétiens, dont le principal, l’apôtre Paul, est d’ailleurs citoyen romain de naissance (Actes 22.25 ; Actes 22.29), ce qui lui facilite grandement ses voyages de mission à travers l’empire. Mais le conflit entre Rome et l’Église éclate dans l’Apocalypse (voir ce mot). La Bible se termine en effet par le récit de la lutte entre Rome et le Christ glorifié, et par la vision prophétique et grandiose du triomphe de ce dernier.
  3. Influence de Rome sur les destinées du christianisme Il n’est pas inutile de rappeler ici que l’Église, peu à peu et presque inconsciemment, a calqué son organisation sur celle de l’empire romain, que son gouvernement est devenu, comme celui de l’empire, autocratique et fortement centralisé, que l’Église catholique et apostolique est devenue Église romaine. Rome est demeurée à travers les siècles la métropole de l’Église catholique et le latin est resté sa langue sacrée.
  4. Église de Rome. Il serait vain de vouloir rattacher à la fondation de l’Église de Rome le nom de quelque illustre apôtre. Paul a simplement correspondu avec cette Église, comme en témoigne l’épître aux Romains (voir article), et séjourné dans la ville comme en témoignent les derniers versets du livre des Actes (Actes 28.14 et suivants). La tradition qui fait de Pierre le fondateur de cette Église se heurte à des difficultés insurmontables ; celle qui y fait mourir Pierre et Paul (voir ces mots) par le martyre sous le règne de Néron est beaucoup moins invraisemblable. La communauté de Rome joua de bonne heure un rôle de premier plan dans l’Église chrétienne ; elle fut aussi l’une des plus éprouvées par les persécutions, en particulier par celle de Néron, très brève, très localisée, mais atroce, à la suite de l’incendie de la ville (64). Les chrétiens, qui ne voulaient pas être incinérés comme les païens, mais enterrés, eurent bientôt leurs cimetières dans la campagne romaine : les catacombes, galeries souterraines superposées, qui servirent aussi de lieux de réunions pendant les périodes de persécution. On y trouve les premiers vestiges de l’art chrétien. La Rome moderne est pour tout chrétien un lieu de pèlerinage émouvant : les jardins du Palatin, l’arène du Colisée, les catacombes évoquent pour eux une des pages les plus tragiques, mais les plus glorieuses de l’histoire de l’Église.

J. M.


Dictionnaire Encyclopédique de la Bible par Alexandre WESTPHAL, Pasteur, Docteur en Théologie, et professeur honoraire de l'Université de Toulouse (Faculté de Théologie protestante de Montauban).
Edition originale publiée en 1932 par les Editions et Imprimeries « Je Sers », Issy-les-Moulineaux. Imprimeries Réunies Ducros et Lombard, Aberlen et Cie. Valence sur Rhone.
Numérisation Yves PETRAKIAN – 2005 France.