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Maranatha
Dictionnaire Biblique Westphal

Expression araméenne qui se trouve deux fois dans le Nouveau Testament. Dans 1 Corinthiens 16.22, elle suit immédiatement l’anathème formulé par l’apôtre Paul, très probablement contre les émissaires des judéo-chrétiens qui contestaient la validité de son ministère et, par leur opposition, jetaient le trouble dans la vie religieuse des chrétiens de Corinthe : « Si quelqu’un n’aime pas le Seigneur, qu’il soit anathème ! Maranatha ». Dans Apocalypse 22.20 : « Oui, je viens bientôt, dit celui qui atteste ces choses. Amen ! Maranatha. »

On a beaucoup discuté pour fixer la signification véritable de cette expression (voir Corinthiens, 1ère épître I, 1.). Si l’on s’accorde, en général, à reconnaître qu’elle est composée des deux mots araméens maran et atha, ou marana tha, les critiques ne sont pas unanimes dans leurs interprétations. Pour les uns, la formule exprimerait une simple constatation : « Le Seigneur vient » (ou : est venu, ou, comme traduit Renan : va venir) ; cf. Philippiens 4.5 : « Le Seigneur est proche ». Les autres y voient une formule impérative, ou une prière : « Seigneur, viens ! » analogue à la requête de l’Oraison dominicale : « Que ton règne vienne ! » Il n’est pas impossible que Maranatha ait le premier sens dans le texte de 1 Corinthiens, et le second dans celui de l’Apocalypse comme dans la Didachè (10.6), à la fin de la prière eucharistique : « Si quelqu’un est saint, qu’il vienne ! Si quelqu’un ne l’est pas, qu’il se repente ! Maranatha. Amen. »

On a aussi vu dans cette expression une formule imprécatoire par laquelle on menacerait un pécheur, un impie, un persécuteur de la venue du Seigneur et du châtiment terrible qui s’ensuivrait pour lui. Ce serait même, pour d’aucuns, la plus redoutable des formules d’anathème. Et il faut reconnaître que le contexte de 1 Corinthiens 16.22 pourrait autoriser cette façon de voir. Maranatha serait là comme une sorte de parallèle du mot anathêma, qu’il viendrait en quelque sorte renforcer. Il paraît vraisemblable que dans la suite des temps l’expression a pris cette acception comminatoire, comme semblerait l’indiquer une inscription du IVe ou du Ve siècle retrouvée sur un tombeau de l’île de Salamine. Mais rien ne permet de penser que tel en ait été le sens primitif ; au contraire. On s’est demandé si la formule était déjà en usage chez les Juifs. Cela ne paraît pas impossible. Elle aurait alors été appliquée à la venue du Messie annoncé par les prophètes. Mais il n’y a là rien de sûr. Quoi qu’il en soit de son origine juive ou purement chrétienne, il est assez probable qu’elle était d’un usage courant chez les croyants de la primitive Église et qu’elle devait être entre eux comme un signe de reconnaissance et de ralliement.

La conviction de la proximité du retour du Seigneur était tout à fait générale chez les premiers chrétiens ; cette certitude était en quelque sorte le fondement de leur piété, de leur patience dans l’affliction, de leur attente du juste jugement de Dieu qui allait s’exercer sur toute la terre, et de leur invincible espérance de la vie éternelle (cf. Hébreux 10.32 ; Hébreux 10.39 ; Apocalypse 1.3 ; Apocalypse 22.12 etc.). Quelle force et quelle consolation ne trouvaient-ils pas, eux, dont la plupart n’avaient pas eu la joie de connaître le Seigneur « selon la chair », dans cette assurance qu’ils allaient enfin bientôt le voir lui-même, en personne (cf. 1 Pierre 1.7 ; 1 Pierre 1.9) ! Quel encouragement n’était-ce pas que de pouvoir raviver à chaque instant en eux-mêmes et dans l’âme de leurs frères, par la glorieuse affirmation et la prière incluses dans Maranatha, cette certitude du triomphe final du Seigneur sur toutes les puissances du mal, déchaînées comme jamais encore, au moment de la terrible persécution qui décimait l’Église ! On n’eût pu concevoir, en vérité, une conclusion plus émouvante et plus réconfortante à la fois que l’expression Maranatha au livre de l’Apocalypse et au Nouveau Testament tout entier.

M. M.

Marbre  

Dictionnaire Encyclopédique de la Bible par Alexandre WESTPHAL, Pasteur, Docteur en Théologie, et professeur honoraire de l'Université de Toulouse (Faculté de Théologie protestante de Montauban).
Edition originale publiée en 1932 par les Editions et Imprimeries « Je Sers », Issy-les-Moulineaux. Imprimeries Réunies Ducros et Lombard, Aberlen et Cie. Valence sur Rhone.
Numérisation Yves PETRAKIAN – 2005 France.