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Sirènes
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet

Monstres marins, célèbres dans les écrits des poêtes. Ils disaient qu’elles étaient filles du fleuve Achéloüs et d’une des neuf Muses. Les uns veulent que ce soit Melpomène, d’autres Calliope, ou Terpsichore, ou une autre : en un mot, on ne convient pas du nom de leur mère ni de leurs propres noms. Elles étaient au nombre de trois. Les uns les appellent Aglaëpe, Pisinoë, Thelxiopia ; d’autres, Thelxiopé, Molpé, Aglaophonos ; d’autres enfin, Leucosie, Ligea, Parthenopé. Leur demeure était sur la mer de Sicile, et elles chantaient si mélodieusement, que les mariniers qui passaient par là couraient risque de faire naufrage, en s’approchant trop de leur bord et en s’arrêtant, pour les entendre.

Elles étaient semblables en partie à de belles femmes, et en partie à des oiseaux. Elles avaient les ailes et les pieds d’oiseaux, et le reste du corps d’une femme. Lorsque les Argonautes passèrent par là, les Sirènes firent ce qu’elles purent pour les attirer ; mais Orphée ayant pris sa lyre, rendit leurs chanta et leurs efforts inutiles ; en sorte que les Sirènes, au désespoir d’avoir ainsi été vaincues, se jetèrent dans la mer et furent changées en rochers. D’autres disent qu’elles se précipitèrent dans la mer et furent métamorphosées en monstres marins, ayant la moitié du corps de femme, et l’autre moitié de poisson, èt que cela arriva après qu’Ulysse eut trompé leur attente, en bouchant avec de la cire les oreilles de ses compagnons, et en se faisant attacher avec de bonnes cordes au mât de son navire, avec défense de l’en détacher, quelque instance qu’il en pût faire.

Mais nous n’entrons pas dans l’examen de ces fables. Ce qui nous a fait parler ici des Sirènes, c’est que leur nom se trouve dans Isaïe (Isaïe 13.22) : Respondebunt ulule in cedibys ejus, et Sirenes in cedibus voluptatis. Le prophète parle de la ruine de Babylone ; n dit que cette fameuse ville sera réduite en un affreux désert, que les eaux couvriront ses ruines, qu’on y verra des monstres marins, des oiseaux de mauvais augure, des hiboux, des butors, etc. Le texte latin y joint des Sirènes ; les Septante, des hérissons. Le texte hébreu lit : Thannim. Or, en comparant ensemble tous les passages où ce terme thannim se trouve, on remarque qu’il signifie un grand poisson, un monstre marin, un poisson qui jette de grands cris, qui nourrit ses petits à la mamelle (Lamentations 4.3), et qui a sa demeure dans la mer et dans les lieux aquatiques (Psaumes 52.7 Isaïe 27.2 Ézéchiel 32.2 : qualités qui conviennent à la baleine ou au veau marin, qu’Isaïe a voulu apparemment désigner ici.

Peut-être que saint Jérôme, en traduisant Sirènes, a voulu marquer certains monstres marins que l’on dit être assez semblables à l’homme. [M. Cahen, d’après Gésenius, rend le mot hébreu par chakals. Il traduit : Les hiboux gémissent dans les palais, les chacals dans les asiles du plaisir. Il remarque que, selon plusieurs, ce mot signifie crocodile, ou serpent aquatique].

On dit qu’en 1672 on prit une sirène à Malte. Cornelius à Lapide parle d’une sirène qui fut prise dans la Frise, et qui vécut assez longtemps pour apprendre, dit-on, à filer. Entre l’île de Ceylan et la pointe de l’Inde, on prit neuf sirènes et sept tritons. Aux rôles de la Martinique, proche d’un rocher qu’on appelle le Diamant, on vit un homme marin, qui, depuis le haut jusqu’à la ceinture, avait la figure d’homme, et qui avait tout le bas de poisson. On pêche aux îles Philippines certains poissons semblables aux sirènes. On en voit aussi beaucoup dans la province d’Angola. Il s’en trouve de mâles et de femelles, ayant près de huit pieds de long et quatre de large. Leurs bras sont fort courts, mais les doigts de la main sont longs ; la tête et les yeux sont ovales, le front est élevé, le nez plat, la bouche grande ; mais ils n’ont presque point de menton, ni d’oreilles. Leurs cris, quand on les tue, sont comme d’un homme qu’on assassine. Il n’est pas impossible qu’Isaïe et saint Jérôme n’aient eu connaissance, de ces monstres marins, et qu’ils n’aient voulu les désigner en cet endroit. Le nom de Sirènes peut dériver de l’hébreu schir ou sir, qui signifie un cantique. [Voyez Tannim].

Sis