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Raphael
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet
Westphal

Un des sept premiers anges qui sont continuellement devant le trône de Dieu, et qui sont toujours prêts à exécuter ses ordres (Tobie 12.15). Le nom de l’ange Raphael ne se trouve dans l’Écriture que dans l’histoire de Tobie. Il n’en est pas parlé dans le Nouveau Testament ; et en général les noms des anges ne paraissent pas avoir été connus avant la captivité de Babylone. Tobie l’ancien, ayant prêté, ou, selon le texte grec, ayant seulement confié en dépôt à un Juif nommé Gabélus la somme de dix talents, résolut dans sa vieillesse d’envoyer son fils, le jeune Tobie, pour répéter cet argent (Tobie 5.5-7). Comme Tobie le fils cherchait un guide pour le conduire de Ninive à Ragés, ville de Médie, il trouva heureusement Raphael, qui, ayant pris une forme humaine, s’engagea, moyennant une drachme par jour et la nourriture, à le conduire à Ragés, et à le ramener à Ninive. Ce saint conducteur prit le nom d’Azarias, but et mangea avec Tobie pendant lotit le voyage, et ne fit rien qui lui donnât le moindre soupçon que ce fût un ange.

Ils partirent ensemble de Ninive, et étant arrivés dans une auberge sur le Tigre, Tobie le jeune alla laver ses pieds dans le fleuve ; et un grand poisson étant venu contre lui menaçait de le dévorer ; mais Raphael lui dit de le saisir par les ouïes, de le tirer à terre, d’en prendre le cœur, le fiel et le foie, et de les réserver pour l’usage qu’il lui dirait en temps et lieu (Tobie 6.1-3). Lorsqu’ils furent près d’Ecbatane, Raphael dit à Tobie : il y a dans cette ville un nommé Raguel (Tobie 6.10-12), qui a une fille unique, que vous devez épouser, selon la loi, comme étant le plus proche parent, et parce qu’elle est seule héritière des biens de son père. Tobie lui dit qu’il avait appris que cette fille avait déjà eu sept maris, et que le démon les avait tous fait, mourir. Raphael le rassura et lui dit que le démon n’avait aucun pouvoir sur ceux qui entraient dans le mariage par des vues de la crainte du Seigneur ; que d’ailleurs, il avait dans le cœur du poisson qu’il avait pris, un remède certain contre toute sorte de démons, et qu’aussitôt qu’il en brûlerait sur les charbons, le démon s’enfuirait.

Ils entrèrent donc chez Raguel (Tobie 7.1-3) ; Tobie épousa Sara ; et en observant les sages règles que lui donna Raphael, il ne souffrit aucun mal, et le démon qui obsédait en quelque sorte Sara, fut relégué dans la haute Égypte. Pendant, les jours de la noce (Tobie 9.1-3), Tobie pria Raphael d’aller retirer des mains de Gabélus l’argent qui était le principal sujet de son voyage. Raphael alla à Rages, et rapporta l’argent à Ecbatane. Après que la cérémonie des noces fut achevée, Tobie partit avec sa nouvelle épouse pour s’en retourner à Ninive. Mais quand ils furent à Haran ; au milieu du chemin (Tobie 11), Raphael persuada à Tobie de prendre les devants, pour tirer d’inquiétude ses père et mère, qui comptaient les jours de son absence. Ils partirent donc ensemble ; et étant arrivés à Ninive chez Tobie père, après les premières civilités, le jeune Tobie par le conseil de Raphael, mit sur les yeux de son père du fiel du poisson qu’il avait pris, et environ une demi-heure après ce vieillard recouvra la vue.

Après cela les deux Tobie firent venir Raphael, qu’ils ne prenaient encore que pour un homme, et lui dirent qu’ils le priaient de recevoir la moitié de leurs biens (Tobie 12.1-3) pour récompense des grands services quit leur avait rendus. Alors Raphael leur dit en secret de rendre grâces à Dieu, auteur de tous biens. Lorsque vous faisiez l’aumône, ajouta-t-il, et que vous ensevelissiez les morts, j’ai présenté vos prières au Seigneur ; et parce que vous étiez agréables à ses yeux, il fallait que la tentation vous éprouvât. Maintenant donc le Seigneur m’a envoyé pour vous guérir et pour délivrer du démon Sara, l’épouse de votre fils ; car je suis l’ange Raphael, l’un des sept qui sont toujours devant le Seigneur Lorsque j’étais avec vous, j’y étais par l’ordre du Seigneur. Bénissez-le donc et chantez ses louanges. Il vous a paru que je buvais et mangeais avec vous ; mais pour moi, je me nourris d’une nourriture et d’un breuvage invisibles. Il faut à présent que je m’en retourne vers celui qui m’a envoyé. Ayant dit cela, il disparut, et ils ne le virent plus. Oa peut voir l’histoire des deux Tobie plus amplement sous leur titre. Voyez Tobie.

Le nom de Raphael signifie remède de Dieu, ou médecin de Dieu ; et rien ne convient mieux au personnage que fit l’ange dans cette occasion et au dessein que Dieu avait en l’envoyant à Tobie et à Sara, que le nom de médecin de Dieu.

Il dit qu’il était Azarias, fils du grand Ananias ; et Tobie, qui connaissait cette famille, dit qu’il était d’une naissance illustre. Les textes hébreu, syriaque et grec de cet endroit de Tobie portent : Vous êes, mon frère, d’une bonne et honnête famille, car j’ai connu Ananias et Joathan, fils de Séméia l’illustre. Nous allions ensemble à Jérusalem adorer le Seigneur, et offrir nos prémices et les dîmes de nos fruits. Ils n’ont point suivi les égarements de leurs frères. Vous êtes d’une race illustre, mon frère.

On demande si dans tout cela Raphael n’a point fait un mensonge. Il semble qu’on ne peut pas nier qu’il n’ait menti, puisque certainement il n’était ni Azarias, ni fils d’Ananie, ni Israélite, ni, en un mot, homme tel qu’il paraissait. Il a parlé contre sa pensée et contre sa connaissance, il a fait croire à Tobie ce qui était contre la vérité, il l’a en quelque sorte trompé, et lui, et tous ceux qui l’ont pris pour un messager. Mais les commentateurs pour l’ordinaire l’excusent du mensonge. Il était envoyé de Dieu pour conduire le jeune Tobie, sous la forme d’un jeune homme nommé Azarias : il devait donc agir et parler comme lui et en son nom. Les anges qui ont apparu aux patriarches et à Moïse ont parlé et agi comme si c’eût été Dieu même, parce que Dieu les envoyait pour représenter sa personne. Un acteur de tragédie qui représente Cyrus dit sans mensonge qu’il est Cyrus. De plus les actions surnaturelles de la nature de celle dont il est question ici ne sont pas soumises aux lois communes et ordinaires ; elles sont d’un caractère et d’un ordre supérieur ; elles sont figuratives et mystérieuses ; elles n’ont aucune des qualités essentielles au mensonge, considéré comme action humaine, morale et contraire à la vérité et à la justice.

On demande aussi comment Raphael mangeait et buvait ; s’il buvait et mangeait réellement, ou seulement en apparence. Les sentiments sont partagés sur cette question. Quelques-uns soutiennent qu’il ne mangeait pas, et Raphael paraît exprès pour ce sentiment, lorsqu’il dit : Il vous a paru que je buvais et mangeais avec vous ; mais je me nourris d’une viande invisible et d’un breuvage qui ne peut dire vu des hommes. Il paraissait donc seulement manger, et les sens de Tobie et des assistants étaient trompés en croyant qu’il prenait de la nourriture, quoique en effet il n’en prit point. D’autres prétendent que les anges qui ont apparu aux hommes mangeaient réellement. Saint Justin n’y trouve nulle difficulté, puisque aussi bien dans le ciel les esprits bienheureux se nourrissent, dit-il, du pain des anges, comme parle l’Écriture (Sagesse 16.20). Tertullien reconnaît de même que les anges, ayant paru dans une chair naturelle, ont pu manger naturellement et véritablement.

Saint Augustin ne met point d’autre différence entre les anges et les hommes qui mangent, sinon que les derniers mangent par nécessité, pour réparer leurs forces et pour se sustenter, et que les autres n’ont aucun besoin de manger. Il croit que quand Raphael dit à Tobie : Il vous a paru que je buvais et que je mangeais, il ne nie pas qu’il ne bût et ne mangeât ; mais il veut dire qu’il leur paraissait qu’il mangeât par nécessité, au lieu qu’il ne le faisait que parce qu’il le voulait bien. C’est ainsi que Notre-Seigneur a bu et mangé après sa résurrection. Mais que devenait cette nourriture que les anges prenaient dans leurs apparitions et Jésus-Christ après sa résurrection ? Elle se dissipait par la transpiration, par raréfaction, ou par d’autres voies qui nous sont inconnues ; mais elle ne se tournait point en la substance de ceux qui la prenaient.