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Persepolis
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet
Westphal Bost

Ville capitale de Perse.

Les Perses l’appellent Esthekar ; elle est située à 88° de longitude, et à 30° de latitude, selon le calcul des Tables arabiques. L’auteur du Lebtarikh écrit que Kischtasb, fils de Lohorab, cinquième roi de Perse, de la race des Caïanides, y établit sa demeure, qu’il y fit bâtir plusieurs de ces temples dédiés au Feu, que les Grecs appellent Pyrea ou Pyrateria, et les Perses Athesch Khané et Athesch Gheda ; et que fort près de cette ville, dans la montagne qui la joint, il fit tailler dans le roc des sépulcres pour lui et pour ses successeurs. L’on en voit encore aujourd’hui les ruines, avec des restes de figures et de colonnes, lesquelles, quoique effacées par la longueur des temps, marquent assez que les anciens rois de Perse avaient choisi leur demeure en cet endroit. On en voit les descriptions dans les Voyages de Chardin, et on dit que M. le Bruin, fameux voyageur, doit les donner incessamment plus corrects que ce qu’on a vu jusqu’ici.

Il ne faut pas confondre ces monuments avec un superbe palais que la reine Homaï, fille de Bahuman, fit bâtir au milieu de la ville d’Esthekar ; on le nomme aujourd’hui, en langue persienne, Gihil ou Tchilminar, les quarante phares ou colonnes. Les musulmans en firent autrefois une mosquée ; mais la ville s’étant entièrement ruinée, on s’est servi de ses débris pour bâtir celle de Schiraz, qui n’en est éloignée que de douze parasanges, et qui est devenue la capitale de la province de Perse proprement dite.

Le même auteur, parlant de l’ancienne Persépolis ou Esthekar, lui donne douze parasanges de long et dix de large, ce qui est sans doute exagéré ; mais il est certain que tous les historiens de Perse en parlent comme de la plus ancienne et de la plus magnifique ville de toute l’Asie.

Ils croient que ce fut Giamschid qui en fut le premier fondateur ; et quelques-uns en font remonter l’antiquité jusqu’à llouschenk, et même jusqu’à Caiumarath, premier fondateur de la monarchie de Perse. Il est vrai cependant qu’elle a tiré son principal lustre de la seconde dynastie des rois, qui abandonnèrent le séjour de Balke en Corassan, pour demeurer à Esthekar.

La tradition fabuleuse des Persans porte que cette ville a été bâtie par les Péris, c’est-à-dire par les fées, du temps que Gian-Ben Gian gouvernait le monde, longtemps avant le siècle d’Adam ; ce qui n’est attribué à aucune autre ville d’Asie qu’à Esthekar et à Baalbek. Ils disent aussi qu’en jetant les fondements d’Esthekar, on trouva un vase de turquoise qui contenait quatre pintes ou deux livres de liqueur. Ce vase si précieux fut nommé par excellence Giamschid, qui signifie en persan le vase du Soleil ; et les poètes persiens allégorisent en mille manières sur ce fameux vase, et le transforment en cent figures diverses pour embellir leur poésie.

Il est dit dans le second livre des Machabées (2 Machabées 9.1-2) qu’Antiochus Épiphane étant allé à Persépolis, dans le dessein de piller un temple très-riche qui y était, tout le peuple courut aux armes et le chassa avec ses gens. Dans le premier livre des Machabées (1 Machabées 6.1), où la même histoire est racontée, il est dit que ce fut à Elymaïde qu’Antiochus Épiphane trouva de la résistance en voulant piller le temple de Nannée (2 Machabées 1.13-15). Voyez ci-devant l’article de Nannée. Quant aux villes d’Elymais et de Persépolis, il est certain qu’elles étaient très-différentes et fort éloignées l’une de l’autre. Elymaïs est sur l’Eulée, et Persépolis sur l’Araxe. D’ailleurs Persépolis était ruinée du temps d’Antiochus Épiphane, Alexandre le Grand y ayant mis le feu et l’ayant entièrement détruite. Il faut donc reconnaître, ou qu’il y a faute dans le texte du second livre des Machabées, ou que l’auteur a mis Persépolis pour marquer la capitale de Perse, quoique son vrai nom fût Elymaïs [Il ne sera pas inutile de rapporter ce que Barbié du Bocage dit de Persépolis. « C’était une des cités les plus considérables et les plus importantes de la Perse ; ses ruines occupent une partie d’un plateau nommé Merdasht, d’un village que l’on appelle ainsi. Ce plateau ne comprend pas moins que l’espace d’un degré, du 30° au 31° de latitude septentrionale, ou environ 25 lieues, du N. au S., sans suivre cependant la ligne directe. Il est très-fertile ; et ce qui contrihue à lui donner cet avantage, c’est le cours du Bend-Emir, l’ancien Araxe, qui reçoit le Kur, Cyrus, et s’écoule dans un petit lac auprès de Schiras. Cette plaine est en beaucoup de places couverte d’antiquités qui, d’après leur caractère, appartiennent à des époques bien éloignées l’une de l’autre. Tchil-Minar (les 40 colonnes) est le nom que les Arabes donnent, en général, aux restes de l’opulente cité de Persépolis. Cependant ce nom s’applique particulièrement aux ruines de son palais, auprès duquel on retrouve encore deux grands mausolées. À environ deux lieues de ce palais, au N.0., sont aussi, outre plusieurs ruines de colonnes, de piliers, etc., quatre autres mausolées nommés tombeaux des rots, et ces monuments, en relief ou en inscriptions taillées dans le roc, que le savant M. de Sacy est parvenu à déchiffrer (Mém sur des antiq de la Perse, Paris, 1793). Dans la plaine de Murghaub, voisine du plateau de Merdasht, sont aussi les antiquités de Pasagarda ; et plus au Nord enfin, sur la frontière de la Médie, tes monuments de Bisutun. Cette réunion de monuments indique certainement l’intérêt qui doit s’attacher à l’exploration de ce sol, que l’on peut considérer comme celui de la capitale de la Perse. Cette opinion, attestée par des historiens dignes de foi, et au besoin par la conduite d’Alexandre, qui, épargnant les villes de Babylone et de Suse, crut se venger sur la Perse en immolant Persépolis, est cependant, sinon combattue, du moins mise en doute. Selon Hééren (Politiq et Comment., etc. 1.210), en effet, il ne faudrait pas voir en elle une résidence permanente des souverains de la Perse, comme dans tes grandes villes de Suse, d’Ecbatane et de Babylone, avec lesquelles on ne saurait la mettre en parallèle, mais sans doute un séjour passager et fugitif. Toutefois, que Persépolis ait été capitale de l’empire des Perses, ou qu’elle ne l’ait pas été, toujours est-il qu’elle dut jouir d’une grande importance, si l’on en juge d’après les imposantes ruines et les antiquités nombreuses dont le sol qui l’environne est couvert. Anliochus Épiphane voulut en vain s’en emparer ; à sa honte, il succomba dans son attaque. Ce fait est rapporté dans le deuxième livre des Machabées à Persépolis, et dans le premier à Elymais. »]