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Corbeau
Dictionnaire encyclopédique de la Bible de Augustin Calmet
Westphal Bost

Oiseau de rapine, de plumage noir, déclaré impur par la loi de Moïse (Lévitique 11.15). Noé ayant fait sortir un corbeau de l’arche, pour voir si les eaux s’étaient retirées de dessus la terre, cet animal ne revint point dans l’arche (Genèse 8.6-7). On dit que quand le corbeau voit ses petits nouvellement éclos et couverts d’un poil blanc, il en conçoit une telle aversion qu’il les abandonne et ne retourne à son nid que quand ce premier poil est tombé, et qu’ils commencent à se revêtir d’un plumage noir. C’est, dit-on, à cela que le Psalmiste fait allusion, lorsqu’il dit (Psaumes 146.9) : Dieu donne la nourriture aux animaux et aux jeunes du corbeau qui crient vers lui. Et Job (Job 38.41) : Qui a préparé la nourriture au corbeau, lorsque ses petits crient au Seigneur, courant çà et là, parce qu’ils n’ont rien à manger. Mais ceux qui ont étudié le plus exactement la nature des oiseaux et des animaux, ne conviennent pas de ce fait qui, d’ailleurs, a trop l’air de fable pour être cru sans de bonnes preuves.

Vossius dit que ce qui fait que les corbeaux quittent quelquefois leur nichée, c’est l’extrême voracité des jeunes corbeaux, que leurs pères et mères ne peuvent suffire à nourrir d’autres veulent que cela vienne uniquement d’oubli de la part des corbeaux, qui ne pensent plus à retourner à leur nid pour y nourrir leurs petits d’autres croient que Job et le Psalmiste font attention à ce qui est est dit dans quelques auteurs, que les corbeaux chassent leurs jeunes du nid de très-bonne heure, et les obligent de s’éloigner du lieu où demeurent leurs pères ; et que c’est dans ces occasions que la Providence prend soin de leur nourriture. Enfin il y en a d’autres qui, sans y chercher plus de finesse, tiennent que la Providence s’étend sur les animaux à quatre pieds, et sur les oiseaux qui crient à elle à leur manière, et que les corbeaux sont mis dans les endroits que nous avons cités, au lieu des oiseaux en général.

Le prophète Élie s’étant retiré par l’ordre de Dieu sur le torrent de Carith (1 Rois 17.5), le Seigneur le fit nourrir pendant quelque temps par des corbeaux qui lui apportaient, le soir et le matin, du pain et de la chair. Quelques interprètes au lieu des corbeaux, traduisent les termes de l’original par des Arabes, oti des marchands, ou même des habitants de la ville d’Arabo ou d’Oreb, près de Bethsan. Pour appuyer ces traductions, on remarque que le corbeau étant un oiseau déclaré impur par la loi (Lévitique 11.15), il n’y a pas d’apparence que Dieu l’eût voulu employer à ce ministère. Mais, malgré ces raisons, la plupart des interprètes et des commentateurs s’en tiennent à la version qui porte des corbeaux. Si ceux qui apportaient de là chair et du pain à Élie étaient des hommes, pourquoi ne lui auraient-ils pas aussi apporté de l’eau, lorsque le torrent de Carith fut desséché, pour lui épargner la peine d’aller chercher une autre retraite chez une pauvre veuve à Sarepta ?

Le corbeau était consacré à Apollon, comme au dieu de la divination. La noirceur du corbeau est passée en proverbe (Cantique 5.11). On voit toutefois des corbeaux blancs, et ils ne sont pas rares dans les pays septentrionaux, où la neige demeure longtemps sur la terre. On a cru que le corbeau concevait par le bec, mais c’est une fable. Le corbeau vit très-longtemps. Pline a dit qu’ils vivaient l’âge de neuf hommes ; mais il convient que c’est un conte. On assure qu’ils vivent jusqu’à cent ans. Ils se nourrissent de carnage et mangent les corps des hommes pendus et crucifiés.

Non pasces in cruce corvos, dit Horace.

Et le Sage (Proverbes 30.17) : Que les corbeaux du torrent arrachent les yeux du fils qui se moque de son père ! Sophonie (Sophonie 2.14 Isaïe 34.11) semble marquer que l’on nourrissait des corbeaux sur la porte des maisons. Mais il marque plutôt qu’après la désolation des peuples de l’Idumée, des Moabites et des Ammonites, on verra des corbeaux sur leurs fenêtres et sur les portes de leurs maisons ruinées. Cet oiseau apprend assez aisément à parler et il imite la voix de l’homme.

On connaît plusieurs espèces de corbeaux ; on en a vu qui avaient le bec et les pieds rouges comme du corail. Il y a un corbeau rouge, Pyrrus corax. Il est plus petit que la corneille et que le chomas rouge, il est de la grosseur du petit chomas ou chouette. Il a les jambes et le bec jaunes et tirant sur le noir, du reste il est tout noir. Cet oiseau se trouve dans les Alpes, en Suisse, en Auvergne, en Candie, au mont Jura. Le corbeau aquatique a le bec long et crochu par le bout ; il a le haut de la mandibule supérieure noir, le reste d’une couleur composée de jaune et de rouge ; les plumes de ses ailes et de son dos sont d’une couleur de chatain ; les bords extérieurs en sont noirs, tout le reste de l’oiseau est noir, les plumes de son ventre sont blanches, les plumes de son dos sont colorées d’un vert noirâtre par les bords et par le milieu d’un cendré clair et de roux. Le dessus du cou est couvert de plumes noires et blanches, et le devant de plumes noires et vertes. Ses ailes sont très-longues et de même couleur que le dos.

Le corbeau de bois, nommé par les Lorrains corneille de mer, est de la grandeur d’une poule ; à le voir de loin, il paraît noir par tout le corps ; mais si on le considère de près, principalement lorsque les rayons du soleil donnent sur lui, il paraît d’une couleur verte. Son bec est rougeâtre et longuet, il a les pieds à-peu-près semblables à ceux d’une poule, il se nourrit de vers et d’insectes, sesjambes sont longues et d’un rouge obscur. Il fait sun nid au haut de tours inhabitées, et qui tombent en ruine.

Le petit corbeau, ou corbeau de nuit, nycticorax, fréquente les eaux et se retire dans les roseaux, où il fait, la nuit, un cri fort désagréable, et tel qu’un homme qui vomit. Il fait son nid au haut des arbres, pond deux ou trois œufs, et se nourrit ordinairement de poisson. Nous connaissons dans Moïse le nom d’un oiseau qui est traduit Pélican (Psaumes 101, 7 ; Lévitique 11.18), qui vient d’une racine qui signifie vomir, et qui pourrait bien être le corbeau dont nous parlons ici. Voyez ci-après Pélican.

Il est parlé dans l’Écriture (2 Samuel 17.13) de certaines machines avec quoi on démolissait les villes, et on arrachait les pierres des murailles. Ces machines s’appelaient des corbeaux, et les anciens s’en sont beaucoup servis dans les sièges des villes. [Voyez la Dissertation, sur la poliorcétique des Hébreux, parmi les pièces qui précèdent ce Dictionnaire].