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Ancien infinitif du verbe plaire (du latin placere) ; d’où l’expression « prendre plaisir », équivalent à « se plaire ». L’Ancien Testament emploie fréquemment cette expression en parlant de Dieu. « Dieu prend plaisir à la miséricorde », etc. (Michée 7.18 = Matthieu 9.13, cf. Deutéronome 28.63 ; Deutéronome 30.9 ; Psaumes 5.5 ; Psaumes 149.4 ; Ésaïe 38.17 ; Ésaïe 42.1 ; Ésaïe 58.5 ; Jérémie 32.41).
Quand il s’agit de l’homme, « plaisir » désigne l’impression agréable qui se dégage pour lui d’un acte ou d’une circonstance. Le plaisir en soi n’a donc pas de couleur morale. Il est licite ou coupable, permis ou défendu suivant la nature de l’acte ou de la circonstance.
En outre il peut être utile ou nuisible suivant l’esprit qu’on y apporte ou l’usage qu’on en fait. Le croyant met son plaisir en l’Éternel (Ésaïe 58.14, cf. Romains 7.22), à l’observation du sabbat (Ésaïe 58.13), à la célébration des fêtes religieuses (2 Chroniques 30.23). La foule écoutait Jésus avec plaisir (Marc 12.37).
Par contre, dans le cœur de ceux qui sont attachés aux biens d’ici-bas, les « plaisirs de cette vie » étouffent la bonne semence de l’Évangile (Luc 8.14). 2 Pierre 2.13 parle de ceux qui trouvent leur plaisir dans « les délices du jour » (Segond). Il s’agit ici des plaisirs du monde définis dans 1 Jean 2.16.
Le monde étant « soumis à la puissance du Malin » (1 Jean 5.19), le chrétien est appelé sans cesse à vivre en réaction contre le monde, à lutter, à souffrir, à porter dans le monde « l’opprobre du Christ » (Hébreux 13.13). Le goût du plaisir le détourne de ce devoir ; il est donc la marque de l’égoïsme et de la frivolité. Bien des gens qui ont entendu l’appel de Christ et qui n’ont pas le courage d’y répondre se jettent dans les plaisirs pour s’étourdir et s’évader d’eux-mêmes.
L’abus du plaisir est un dissolvant de l’âme. Par l’abus, un plaisir même légitime devient condamnable ; et que dire de l’abus des autres plaisirs, de ceux qui naissent de nos passions (voir ce mot) ? Pascal observe (Pensées, XXV, 6) : « Il n’est pas honteux de succomber sous la douleur et il est honteux de succomber sous le plaisir ». Pourquoi ? Parce que la douleur, au contraire du plaisir, n’a rien qui nous flatte et nous attire. Quand l’homme accepte la voie de la douleur jusqu’à y mourir, il témoigne qu’il est son maître ; tandis que l’homme qui succombe sous le plaisir meurt en esclave. « Il n’y a que la maîtrise qui fait la gloire et que la servitude qui fait la honte ». L’homme se juge par le plaisir qu’il recherche. D’ailleurs rien n’est décevant comme de chercher à se satisfaire par le plaisir. L’Ecclésiaste en a dit depuis longtemps la vanité (Ecclésiaste 2, cf. Proverbes 21.17 ; Apocalypse 18.7, etc.). Vauvenargues posait bien la question (Max., 195) quand il écrivait : « Lorsque les plaisirs nous ont épuisés, nous croyons avoir épuisé les plaisirs et nous disons que rien ne peut remplir le cœur de l’homme. » À quoi le poète chrétien a répondu dans le cantique de Bost :
Rien ne pourra remplir ce cœur toujours avide Que la seule beauté pour laquelle il est fait.
Jésus a dit : « Venez à moi et vous trouverez le repos de vos âmes » (Matthieu 11.28 et suivant). Il faut choisir entre les plaisirs et les béatitudes (Matthieu 5.3 et suivants).
Alexandre Westphal