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L’une des divinités les plus fameuses et les plus vénérées de l’antique Orient sémitique.
Elle fut adorée avec des variantes plus ou moins sensibles par un grand nombre de peuples : chez les Assyro-Babyloniens Ishtar, les Syriens Athar, les Phéniciens Astareth ou Ashtart, les Cananéens, les Abyssins À star, et les Égyptiens qui, d’après Maspéro, possédaient une version particulière de sa légende. Certains indices permettent de supposer qu’elle fut également connue des tribus nomades ou semi-nomades de l’Arabie, notamment de l’Arabie du nord. Les Hébreux, modifiant légèrement son appellation phénicienne, l’avaient nommée Astoreth, les deux dernières voyelles de ce mot impliquant, croit-on, un sens péjoratif par analogie avec l’épithète hochet = honte, souvent utilisée par eux pour qualifier les Baals. L’équivalent grec d’Astoreth était Astarté, que l’on a conservé en français.
Il a été jusqu’ici impossible de déterminer la signification du nom d’Astarté, ainsi que le lien qui le pouvait unir au culte dont elle était l’objet. Ce culte remonte très probablement aux temps reculés du sémitisme, sans que l’on puisse, toutefois, préciser l’époque et le lieu exact de son apparition. Les documents historiques (littérature, inscriptions cunéiformes, etc.) découverts et consultés par les savants autorisent à fixer en Assyro-Babylonie ses manifestations les plus anciennement discernables. Il semble qu’en quelques coins de la Caldée, Ishtar se serait, au moment de la pénétration des Sémites, progressivement substituée à une divinité autochtone : Nânâ, pourvue d’attributs identiques aux siens. Astarté — c’est d’ailleurs le trait le plus général de sa dévotion — fut primitivement adorée comme déesse de la fertilité du sol et du mystérieux épanouissement de la vie dans la variété des formes animales et végétales. Divinité de la terre et de la nature, dont elle régissait les transformations successives et le rythme saisonnier, c’est d’elle que dépendaient la croissance des moissons et leur maturité. Aussi le plus beau mois de l’été, le sixième de l’année, Élul, mois des récoltes, lui était-il consacré. Par une extension très explicable de ses prérogatives, elle ne tarda pas à présider aux destinées de tous les êtres vivants, à devenir comme la mère du genre humain (figure 33), la dispensatrice de l’amour générateur et à être revêtue d’une quasi toute-puissance créatrice et conservatrice, d’une véritable autorité suprême que, dans certaines contrées, elle partagea avec Baal (voir ce mot). Elle eut des sanctuaires célèbres à Ninive et Arbelles. Sur ces données premières s’en greffèrent d’autres. L’empire d’Astarté s’étendit à tous les compartiments de l’existence humaine, de la vie individuelle, sociale et nationale. Et selon les circonstances, les moments et les lieux, on lui attribua tantôt une influence bienfaisante et féconde, tantôt une influence néfaste, destructive, vengeresse et mortelle qui contrastait avec son caractère originel.
C’est sous une forme déjà vulgarisée qu’à la suite, pense-t-on, de quelque grande migration, le culte d’Astarté fut importé parmi les peuples syro-méditerranéens, au contact desquels il se pervertit et dégénéra. C’est alors surtout qu’on divinisa en elle les passions sexuelles et la volupté. Les autels et le rituel qui lui furent dédiés donnèrent naissance à des scènes licencieuses et sanglantes fort dangereuses pour les mœurs populaires. D’où en Israël la violente réaction des prophètes, dénonçant son idolâtrie comme « infâme » et « abominable ». Astarté jouit d’un immense crédit auprès des Phéniciens, spécialement à Sidon, de même qu’auprès des peuplades cananéennes chez lesquelles, sans doute, elle remplaça peu à peu la déesse Achéra ou Ashirat, compagne féminine des Baals, adorée depuis des temps lointains par les Sémites occidentaux et avec laquelle il faut se garder de la confondre. Elle était très honorée des Philistins, dont elle protégeait probablement les entreprises guerrières et qui lui édifièrent à Askalon un temple où fut suspendue l’armure de Saül (1 Samuel 31.10). En Israël, Salomon, subissant la contagion du paganisme phénicien, lui éleva un sanctuaire (1 Rois 11.5-33), plus tard détruit par Josias (2 Rois 23.18).
Les progrès de l’astrologie et de la magie en Assyrie et Babylonie modifièrent de leur côté la nature première du culte d’Astarté, qui de terrestre devint supraterrestre. L’adoration d’Astarté s’identifia, sous leur influence, avec celle de la planète Vénus, guide des armées célestes (étoiles) en qui les Caldéens belliqueux voyaient la déesse des batailles (figure 32). Astarté fut alors pourvue des titres de « reine de victoire », « juge des exploits de la guerre » et représentée « debout sur un lion ou un taureau, coiffée de la tiare étoilée, armée de l’arc et du carquois » (Maspéro). Cet aspect céleste d’Astarté alla s’accentuant. Appelée par les uns « fille de la lune », par les autres « fille du Seigneur du ciel » ou « fille du soleil », elle prit une prééminence de plus en plus marquée et fut finalement révérée comme « reine des cieux ». Durant la période de la ruine de Jérusalem et de l’exil, les Hébreux, en particulier les femmes, lui vouèrent une dévotion vigoureusement condamnée par Jérémie (Jérémie 7.18 ; Jérémie 44.15-26).
C’est un terme générique utilisé en Canaan pour désigner les déesses (Juges 2.13 ; Juges 10.6 ; 1 Samuel 7.3 ; 1 Samuel 7.4 ; 1 Samuel 12.10). On le retrouve dans le nom de quelques localités du pays de Basan : Astaroth (voir ce mot) ou Béesthra et Astaroth-Karnaïm (signifiant : Astartés cornues).
Jean R.