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Espèce domestique du mammifère pachyderme dont le type sauvage est appelé sanglier. Celui-ci (hébreu khazîr, arabe khanzir) est le sus scrofa, qui persiste dans les régions de Palestine où il peut s’abriter (Thabor, rives du Jourdain, du lac de Génézareth, de la mer Morte). Sa nourriture est végétale ; il ne devient omnivore que par nécessité. Il fait dans les cultures d’énormes dégâts (témoin l’image fort appropriée du psalmiste : Psaumes 80.14, cf. Pseudo-Esdras 15.30) ; aussi est-il l’objet de poursuites acharnées qui l’ont rendu très méfiant : il ne quitte guère les couverts, où il est presque en sécurité. Pour le mythe du sanglier de Thammuz, voir ce mot.
Du sanglier provient le porc domestique, ou pourceau (grec khoïros), dont la femelle est la truie (grec hus), et qui paraît avoir été tenu pour sacré et offert aux dieux dès la plus haute antiquité : dans une caverne reliée au plus ancien sanctuaire de Guézer (plus de 2 000 ans avant Jésus-Christ), on a trouvé de nombreux ossements de porc. Les Cananéens le sacrifiaient et mangeaient sa chair ; il semble avoir été la bête préférée pour les sacrifices de Babylone et de l’ancienne Grèce ; il était consacré au dieu Adonis et à la déesse Aphrodite. C’est sans doute pour cette raison, plus encore que par précaution hygiénique contre les maladies de peau que peut provoquer la consommation de sa viande mal cuite, que la loi israélite classait le porc parmi les animaux impurs et en interdisait l’offrande (Lévitique 11.7 ; Deutéronome 14.8 ; Ésaïe 65.4 ; Ésaïe 66.3-17). Enfreindre cette défense était une apostasie, à laquelle leurs maîtres païens tentèrent quelquefois d’entraîner les Juifs (1 Macchabées 1.47 ; 2 Macchabées 6.18). Mais ceux-ci éprouvaient une véritable horreur pour cet animal, qui devint l’emblème de l’impureté (Proverbes 11.22 ; Matthieu 7.6 ; 2 Pierre 2.22) ; des Juifs stricts le désignaient, pour éviter de le nommer, par le terme d’« abomination » (voir ce mot, 2e) ou par l’euphémisme. « une autre chose ». Le métier de porcher leur était pratiquement interdit.
Si deux exemples semblent prouver qu’au temps de Jésus les Juifs étaient devenus moins scrupuleux et que parfois, comme les païens, ils faisaient l’élevage du porc, Jésus désapprouvait certainement ce relâchement, comme son attitude paraît le suggérer dans la scène de Gérasa, où le troupeau est détruit tout entier (Marc 5.11 ; Marc 5.16 ; Matthieu 8.30 ; Matthieu 8.34; Luc 8.32 ; Luc 8.34), et comme il l’indique lui-même dans la parabole de l’enfant prodigue en faisant du métier de gardeur de pourceaux le comble de la dégradation. Pour (Luc 15.15 et suivant) le mot attribué à Auguste sur « le pourceau d’Hérode », voir Massacre des innocents.
Après les Juifs, les musulmans ont hérité de cette aversion pour le porc et dépassent même les Israélites à cet égard : ils s’abstiennent totalement d’en manger, et khanzir est pour eux une épithète injurieuse ; les colons étrangers seuls en élèvent et en consomment. Aussi les porcs sont-ils rares aujourd’hui en Palestine.
C’est très probablement dans l’Asie centrale que le porc a été domestiqué sous le type du porc des tourbières (sus palustris). Les fouilles d’Anau (Turkestan) en ont livré de nombreux restes. De là il aurait gagné à la fois l’Europe centrale, car il apparaît dans les cités lacustres suisses à la fin du néolithique, et aussi l’Asie antérieure et l’Égypte. Il a dû être introduit par des envahisseurs dont le flot dévastateur aurait laissé dans l’âme des vaincus les plus amers souvenirs, ce qui pourrait expliquer l’horreur générale inspirée par cet animal. Plus tard, dans les symboles du Moyen âge, son goût pour les ordures fit du porc le type proverbial des plaisirs immondes, la représentation du diable, ou des démons de la gourmandise et de la volupté ; l’imagerie pieuse le plaçait quelquefois aux pieds d’un saint, non comme compagnon mais comme ennemi vaincu, marquant par là que le saint avait triomphé des tentations de la chair.
E. D.